Nous avons le  très grand plaisir de présenter la première exposition personnelle à la galerie de Jalal Sepehr, photographe iranien qui développe depuis une quinzaine d'années une pratique artistique où se mêlent références historiques et littéraires perses.


L'exposition rassemble des photographies issues de deux séries Water &  Persian Rugs et Knot, chacune constituée de 12 photographies, qui mettent en scène un tapis persan traditionnel, prétexte à la création de situations extraordinaires et au tissage de liens entre Histoire et contemporanéité.


Ce motif qui jalonne les contes des Mille et une Nuits est ainsi rattaché dans notre imaginaire collectif  à ce que nous avons pris l?habitude de nommer « l?orient », cet ailleurs exotique construit de toute pièce par les occidentaux.


Au-delà de cette réappropriation fantasmagorique du tapis, celui-ci occupe en effet une place importante dans la culture perse, l?art de la tapisserie est ainsi issu d?une tradition millénaire intimement rattaché à l?art de faire des jardins ou « Pardis » en pahlavi qui désigne un jardin dans un espace clôt, mot qui provient du mède  « Pairi-daeza ». C?est ainsi qu?au VIème siècle se développe l?art des tapis-jardin ornés de motifs floraux et géométriques représentant le paradis et faisant référence à la littérature et la mythologie perse.


Jalal Sepehr, attiré par l?esthétique des tapis persans et par leur valeur historique, en tant qu?objets témoignant de la culture iranienne, reprend ce motif pour créer des scènes étonnantes où l?humour occupe une place importante. Chaque photographie est minutieusement conçue par l?artiste dans le moindre de ses détails qu?il s?agisse du décor, des costumes ou encore dans le choix des « acteurs » (des proches, amis, artistes à qui il transmet des indications scéniques précises). Cette mise en scène, dont fait l?objet chacune des photographies, va de pair avec une certaine narrativité, à l?exemple de cette  ?uvre de la série Knot où l?on voit sur le toit de maisons un groupe de personnes composé d?hommes et de femmes de plusieurs générations affairées à enrouler des tapis, tel un rituel dont nous ne saisirions pas le sens. Une autre photographie présente un homme assis en tailleur devant une pile de tapis qu?il déplie telles les pages d?un livre remontant le fil de sa vie.


Ces deux séries posent la question de la confrontation, et bien sûr de ce qui fait lien entre tradition et contemporanéité, ainsi une photographie de la série Water and Persian Rugs où un homme en costume, dos au spectateur et face à la mer, assis à l?extrémité d?une jetée recouverte de tapis,  ?autre référence directe à notre époque ? tandis que l?allée de tapis qui le précède et l?accompagne à la fois, évoque une tradition qui ne cesserait de se perpétuer.


Dans un monde qui voit disparaître et détruire ses mythes et ses repères, il est captivant de voir dans les photographies de Jalal Sepehr ce point de fixité : le tapis aux si nombreuses fonctions,  celui que l?on foule de ses pas au quotidien, qu?il recouvre le sol des intérieurs, qu?il soit un élément décoratif, de prières, support  de motifs ancestraux, il  est pour Jalal Sepehr  « lieu de tissage » où dialoguent Histoire, littérature, poésie et humour.


« La plupart des photographies mêlent tradition et modernité créant un conflit et un contraste qui existe au quotidien non pas seulement dans la société iranienne mais également dans d?autres pays du Moyen-Orient. Ce sont les principaux défis auxquels  j?ai dû me confronter dans mes précédents projets ainsi que dans les nouvelles séries sur lesquelles je travaille. La photographie de l?homme assis sur une jetée couverte de tapis symbolise selon moi la jonction entre le monde moderne et le monde traditionnel.  Il me semble que cette photographie évoque la notion de ??traversée?? »
- Jalal Sepehr, 2015.

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